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Comprendre la démence chez les adultes ayant des troubles du fonctionnement intellectuel et de développement – Interview avec Dre Shahin Shooshtari

Photo of Dr Shahin in front of green background. Research logo in left corner

28 janvier, 2025

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Comprendre la démence chez les adultes ayant des troubles du fonctionnement intellectuel et de développement  

La recherche sur la démence chez les adultes ayant des troubles du fonctionnement intellectuel et de développement (TFID) est cruciale pour améliorer les soins et le soutien. Marcel Fisette, responsable des communications à St.Amant, a eu l’occasion d’interviewer Dre Shahin Shooshtari, professeure à l’Université du Manitoba et chercheuse principale au Centre de recherche St.Amant, sur son important travail dans ce domaine.   


Comment tout a commencé

MF : Qu’est-ce qui vous a amené à étudier la démence chez les personnes ayant des TFID?
Dre Shooshtari : J’ai obtenu un diplôme en sciences de la santé publique en Iran et un doctorat en sciences de la santé communautaire à l’Université du Manitoba. Ma formation postdoctorale sur le vieillissement et la déficience, financée par la Manitoba Medical Services Foundation, a suscité mon intérêt. Depuis mon arrivée à l’Université du Manitoba et à St.Amant en 2006, je me suis focalisée sur la recherche relative à la santé et au bien-être des personnes ayant des TFID, notamment leur fonctionnement cognitif.   

MF : Comment a débuté votre travail avec le Centre de recherche St.Amant?
Dre Shooshtari : Mon poste a été financé conjointement par St.Amant et l’Université du Manitoba, ce qui a joué un rôle déterminant. St.Amant a soutenu ma recherche, renforçant la collaboration avec les décideurs politiques, cliniciens, familles et personnes ayant des TFID. L’organisme a aussi aidé à diffuser et recueillir nos résultats, ce qui est crucial pour qu’ils aient de véritables répercussions. 


Ce que la recherche montre

MF : Pouvez-vous nous faire un résumé de vos résultats sur la prévalence de la démence chez les Manitobains ayant des TFID?  
Dre Shooshtari : Nous avons utilisé les données relatives à la santé au Manitoba pour comparer les taux de démence chez les adultes ayant ou non des TFID. Chez les adultes plus jeunes (25 à 54 ans) ayant des TFID, près de 5 % d’entre eux ont des antécédents de démence, ce qui représente un taux quatre fois plus élevé que chez ceux n’ayant pas de TFID. Pour les adultes plus âgés (55 ans et +), le taux était de 13,8 %, presque cinq fois plus élevé. Ceci souligne l’augmentation du risque de démence chez les personnes ayant des TFID, ce qui a des répercussions considérables au niveau de la planification des soins et du soutien.     

MF : Qu’avez-vous appris sur les conditions de vie des personnes ayant des TFID et la démence?
Dre Shooshtari : Les adultes ayant des TFID et la démence étaient, en moyenne, 12 ans plus jeunes au moment du diagnostic que ceux sans TFID. Environ 35 % d’entre eux vivaient dans des établissements de soins de longue durée et les adultes plus jeunes ayant des troubles causés par l’alcoolisation fœtale présentaient les taux de démence les plus élevés, tandis que les adultes plus âgés atteints du syndrome de Down étaient les plus affectés. Ces résultats soulignent les écarts au niveau du soutien pour les personnes plus jeunes qui pourraient ne pas être admissibles aux services traditionnels en matière de démence destinés aux personnes de
65 ans et plus.

MF : Et qu’en est-il de votre recherche au niveau de l’autisme et de la démence?
Dre Shooshtari : Dans le cadre du travail effectué par notre équipe internationale, nous avons analysé les liens entre l’autisme et la démence. Bien qu’il n’y ait aucune preuve concluante d’augmentation du risque de démence chez les personnes autistes, l’étude explore les facteurs génétiques et environnementaux possibles.   


En quoi ce travail est important

MF : Pourquoi est-ce crucial d’étudier la démence chez les personnes ayant des TFID?
Dre Shooshtari : Comprendre les facteurs de risque ainsi que les caractéristiques nous aide à offrir un meilleur soutien et à potentiellement empêcher ou retarder l’apparition de la démence. La détection précoce est un élément clé.

MF : Comment votre recherche contribue-t-elle à combler les lacunes en matière de connaissances?
Dre Shooshtari : Avant notre travail, les données sur les TFID et la démence au Canada étaient très limitées. Nos études ont comblé ces lacunes en analysant la prévalence, les conditions de vie et l’accès aux soins au Manitoba et au-delà. Ceci a permis d’éclairer des politiques comme la Stratégie manitobaine pour les aînés et la Stratégie sur la démence pour le Canada.    


Ce que cela signifie pour les familles et les communautés

MF : Pourquoi la communauté au sens large devrait-elle s’intéresser à cette recherche?
Dre Shooshtari : Les personnes ayant des TFID représentent 1 % de la population du Manitoba, dont beaucoup ont besoin de soutien tout au long de leur vie. La démence ajoute un degré de complexité et la sensibilisation est essentielle pour les personnes soignantes, les décideurs politiques ainsi que les fournisseurs de soins de santé afin d’offrir des soins adaptés.    

MF : Quels outils peuvent aider à faire face à la démence au sein de cette population?
Dre Shooshtari : Le GTN-Outil de dépistage précoce de la démence (GTN-ODPD) est un outil simple que les familles et personnes soignantes peuvent utiliser pour suivre les signes précoces. Le GTN-ODPD est disponible gratuitement et aide à guider la planification des soins.   


Se tourner vers l’avenir

MF : Quelles sont vos futures priorités au niveau de la recherche?
Dre Shooshtari : Nous analysons les risques de démence chez les personnes ayant des TFID au-delà du syndrome de Down et nous nous penchons aussi sur l’accès aux soins de santé. Nous offrons aussi des cours sur la santé du cerveau et nous sommes en train d’évaluer l’utilisation du GTN-Outil de dépistage précoce de la démence en collaboration avec d’autres provinces.  

MF : Comment les organismes tels que St.Amant peuvent-ils appuyer votre travail?
Dre Shooshtari : Le financement est toujours essentiel, mais la promotion d’une culture de recherche inclusive l’est tout autant. Soutenir les membres du personnel ainsi que les participants dans le cadre de projets approuvés nous aide à générer des résultats significatifs.  

MF : Un mot de la fin?  
Dre Shooshtari : Comme les personnes ayant des TFID vivent plus longtemps, elles ont besoin d’un soutien continu pour bien vieillir. La recherche inclusive sur la démence est essentielle pour améliorer la qualité de leur vie et leur permettre de rester connectées à leurs communautés.


Conclusion

MF : Merci, Dre Shooshtari, de nous avoir fait part de cet éclairage et d’avoir souligné l’importance de la recherche inclusive sur la démence. Votre travail contribue à rendre les communautés plus solidaires des personnes ayant des TFID, notamment lorsqu’elles vieillissent.   

Comprendre la démence chez les personnes ayant des TFID est une priorité de plus en plus pressante étant donné que les gens vivent plus longtemps et doivent faire face des défis de santé complexes. La recherche, comme celle menée par Dre Shooshtari, est primordiale pour s’assurer que cette population vulnérable bénéficie de soins adaptés, d’outils de dépistage précoce et d’un soutien individualisé. En sensibilisant et en comblant ces écarts, nous pouvons améliorer la qualité de vie des personnes ayant des TFID et nous assurer qu’elles continuent de se sentir connectées, valorisées et soutenues tout au long de leur vie.